C’est quoi, un "digital native" ?

, par  UCAYA , popularité : 1%

Décoder, décrypter et répondre aux questions de votre quotidien numérique : l’Antisèche est votre rendez-vous hebdomadaire sur RSLN. Au menu cette semaine : le concept de digital natives décortiqué.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Marc Prensky a réussi à faire parler de lui. Depuis son article Digital Natives, Digital Immigrants publié en 2001, dans lequel il a créé le terme digital native, sa plume et sa parole ont été mobilisées dans nombre d’universités et de revues sur l’éducation.

Il faut dire que cet expert ès-TICE (Technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement) a frappé les esprits avec son concept de digital natives (en français : les natifs du numérique). Selon lui, l’an 2000 n’a pas seulement marqué le passage d’un siècle à l’autre. Plus que cela, cette date constitue une rupture fondamentale dans la façon dont les nouvelles générations, nées à partir des années 80, apprennent.

Prensky postule en effet que ceux qui ont grandi avec « l’hypertexte, la musique téléchargée, le téléphone dans la poche, les bibliothèques sur leurs ordis » ont vu leurs cerveaux se structurer différemment par rapport à celui de leurs aînés. Du moins, que leur « schéma de pensée » serait différent.

> Parlez-vous le numérique ?

A quoi reconnaît-on cette rupture ? Pour comprendre qui sont les digital natives, le mieux est encore d’observer ceux qui n’en font pas partie. Si vous ressentez le besoin « d’imprimer vos e-mails », de sortir vos documents sur papier « pour les corriger, plutôt que de le faire à l’écran » ou « d’appeler vos collègues pour leur montrer un site intéressant, plutôt que d’envoyer un lien », alors vous faites probablement partie des digital immigrants.

Comme tout nouvel arrivant en terre inconnue, les « immigrés numériques » entament un long processus d’apprentissage pour s’adapter. Mais il leur restera toujours « un accent » - comme le montre les petites habitudes précitées -, signe qu’ils ont pris le train des nouvelles technologies en marche. C’est exactement comme lorsqu’on apprend une langue étrangère : maîtriser le «  langage des ordinateurs, des jeux vidéo et de l’Internet » se révèlerait plus compliqué avec les années.

> Adieu le latin, bonjour la robotique

Selon Marc Prensky, les changements induits par cette évolution de la structure cognitive des moins de trente ans sont énormes. Car non seulement les digital natives semblent s’instruire différemment, ce qui impliquerait que leurs aînés changent leurs méthodes d’enseignements, mais il auraient également besoin d’apprendre des savoirs différents.

Ainsi, si certaines matières traditionnelles restent d’actualité, comme la lecture, l’écriture et l’arithmétique, d’autres seront à l’avenir de moindre importance, à commencer par le latin, le grec, ou la géométrie. En effet, les matières du futur, comme la programmation, la robotique ou les nanotechnologies devraient davantage intéresser les étudiants du XXIème siècle.

La manière de diffuser ces nouveaux savoirs doit elle aussi être repensée, considère Marc Prensky. Il faudrait rendre l’enseignement plus attrayant, sinon ce serait prendre le risque de faire face à une classe «  qui s’ennuie, alors qu’elle aurait tellement d’autres choses à expérimenter ».

Prensky cite par exemple les jeux vidéo comme outils phare de cette nouvelle pédagogie pour digital natives : « Si cette génération peut retenir les noms de 100 Pokémons », alors il n’y a pas de raison qu’ils « ne puissent pas mémoriser [...] les capitales de 100 pays. Tout dépend de la façon dont on s’y prend. »

> Une controverse loin d’être close

Quand des élèves envoient des textos en classe ou que des étudiants discutent sur Facebook pendant un cours, est-ce la preuve d’un désintérêt moqueur vis-à-vis de leurs professeurs ? Ou plutôt le signe que ces derniers devraient sérieusement dépoussiérer leur manière d’enseigner ?

Il est certain qu’avec le concours des nouvelles technologies (voir à ce sujet notre série dédiée à l’éducation numérique), quelque chose a changé dans le monde de la connaissance.

La rupture est-elle pour autant si prononcée que M. Prensky le pense ? Loin d’embrasser naïvement cette thèse, des études récentes mettent au contraire l’accent sur l’existence d’une continuité entre les générations. Comme le montrent les débats en cours, la question est loin d’être tranchée.

L’enjeu réside en partie pour « l’ancien monde » dans sa capacité à dompter ces générations dopées aux outils numériques.

Ici ou là, les initiatives se multiplient pour prendre la mesure des nouvelles technologies à l’école. Idem en entreprise, où les managers apprennent à prendre en compte les singularités des moins de 30 ans, au profil en apparence plus dilettante, mais pas moins productifs que leurs aînés. Sans oublier, quand cela est nécessaire, de rappeler au souvenir des plus jeunes le caractère sacré de leur vie privée, dont ils n’ont pas toujours conscience. 

De quoi entrer résolument dans une ère post-digital natives ?

Cet article est repris du site http://www.rslnmag.fr/post/2012/01/...