Depardieu en Mordovie : Gégé chez les Soviets, le reportage

, par  Caroline-Gaujard-Larson , popularité : 1%

(Photo : Caroline Gaujard-Larson)

(Photo : Caroline Gaujard-Larson)

Personne ne l’attendait ici ou presque. Des rumeurs couraient bien çà et là depuis quelques jours sur le site local mordovia-news.ru sans que l’information ne soit relayée plus sérieusement par les médias nationaux. Par discrétion, sans doute, car seuls une dizaine de journalistes de médias officiels russes ont finalement été conviés pour l’événement sans compter ceux de la presse locale. Et pour éviter que des journalistes d’opposition ou pire, des journalistes étrangers voire même des Français, ne se glissent dans le minibus. C’est bien à Saransk, capitale de la Mordovie, qu’il fallait chercher Gérard en cette veille de Noël orthodoxe.

Dimanche 6 janvier, 12h15 : les huiles locales et les danseuses en habit traditionnel sont en ligne sur le tarmac de l’aéroport de Saransk et il neige. Tout droit arrivé de Sotchi où il a rencontré Vladimir Poutine la veille, Gérard Depardieu vient d’atterrir. Poitrine au vent à la porte de l’avion, il a sans doute trop à penser pour se rappeler qu’entre Sotchi et Saransk, il y a un écart de 15 degrés.

Grands signes de main en descendant de l’appareil et puis : « Gérard ! Passeport, passeport ! », interpellent tout de suite la flopée de journalistes qui l’assaille. Il ne faut pas lui dire deux fois. Hilare, le nouveau russe exhibe le précieux sésame qu’il place près de son visage. Pas de doute, c’est bien lui, c’est bien Gérard Xavier Depardieu sur la photo. Avant ça, l’hôte de Saransk prend tout de même la peine de goûter un des blinis que les jeunes femmes déguisées lui tendent en le saluant plus bas que terre. « Pas mal le blini, mais le coup du passeport… C’est ça qu’est bon ! », se dit-il sans doute.

« C’est beau »

Un pas de danse puis tourne en rond et Depardieu tombe dans les bras du principal responsable de sa venue : le producteur de cinéma Nikolaï Borodachov. Finalement le troupeau se met en route, direction le centre-ville. Le cortège file à bon train sans jamais déraper sur la route verglacée, comme seuls les conducteurs russes savent le faire. Un premier stop devant les marches gelées qui mènent à la statue de Pougachev et où tout le monde se cramponne fraternellement, puis une visite éclair de l’un des musées de Saransk. Le temps que dure le cours d’Histoire de la conservatrice, l’apprenti Mordovien hoche régulièrement de la tête en signe d’approbation. Son faible débit de paroles est tantôt ponctué de « ah » ou de« c’est beau ». L’espace d’un instant, l’acteur marque un vif intérêt pour un manuscrit qui a inspiré une œuvre à Pouchkine (ndlr, La Fille du Capitaine) qui pourrait d’ailleurs être bientôt porté à l’écran en Russie avec dans le rôle de Pougachev justement, j’ai nommé le nouveau Gérard national.

Et puis tout à coup, patatras… Non non, Gérard ne tombe pas (l’un des élus si) mais nous, on nous tombe dessus. L’un des assistants de l’acteur vient de percuter que la presse française est là. Ça tombe mal : « ah oui là non, c’est pas possible, vous comprenez, avec les médias français qui sont très très durs en ce moment, là non. Il ne veut pas vous parler, surtout ne lui posez pas de questions, d’accord ? » Oui oui, on comprend. On pensait quand même pouvoir continuer la visite discrétos… C’était sans compter avec les sbires à chapka, qui n’ont d’abord pas vu le mal en nous laisser prendre part à la sauterie. Il revient au chargé de com’ de la Mordovie de nous proposer une belle petite balade qui sera plus intéressante que de suivre Depardieu comme notre ombre. Très gentiment il faut le dire, Valery nous reconduit à notre hôtel où l’on nous conseille de nous reposer. Très gentiment encore, Valery nous invite à déjeuner en plein milieu d’après-midi pour s’assurer, peut-être, que l’on n’a pas le temps d’envoyer à Paris les nouvelles du front. Valery une dernière fois, nous propose une visite guidée de la ville le lendemain. Peut-être sommes-nous mauvaise langue.



Caroline Gaujard-Larson

 Plein de cadeaux

Par chance, Irina, qui a servi d’interprète au musée, nous raconte plus tard la fin de visite dans son bon français. Paraitrait que le soir même, « ils vont lui offrir les clés de son nouveau domicile à Saransk », un appartement ou une maison, Gérard choisira. Irina a été conviée au repas du soir, elle a préféré décliner l’invitation et les laisser « entre hommes, oh et puis ils boivent ».

Dans l’avion du retour, Depardieu aura aussi à méditer sur ce qui n’est peut-être pas une plaisanterie. Le chef de la République de Mordovie lui a sorti de sa hotte le poste vacant de ministre de la Culture au sein de son gouvernement. Si c’est comme le coup du passeport… L’intronisation ne prendra pas plus de deux semaines.

Cet article est repris du site http://www.lesinrocks.com/2013/01/0...

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