Doria Tillier : l’exploratrice du “Grand Journalâ€

, par  Jean-Marie Durand , popularité : 2%

(Maxime Bruno/Canal+)

Si les humeurs variables du ciel dépendent des anticyclones et des dépressions qui le traversent, les miss météo de Canal+ s’en moquent, préférant les variations de leur fiel àelles. D’Axelle Laffont àLouise Bourgoin, de Pauline Lefèvre àCharlotte Le Bon, elles ont toutes détourné les prévisions de Météo France au profit de leur météorologie personnelle et foutraque.

Le matin où on la rencontre, Doria Tillier, l’actuelle miss météo du Grand Journal, avoue être incapable de nous expliquer pourquoi le soleil inonde notre table d’un café du boulevard Bonne-Nouvelle, ou pourquoi les nuages d’hiver ont disparu ce jour-là… La distinction entre hautes et basses pressions, domaine de prédilection des experts cathodiques comme Philippe Verdier ou Catherine Laborde, passe au-dessus de la tête de Doria. “Un anticyclone, je pensais au départ que c’était comme un cyclone, une catastrophe ; une dépression, c’est ce que j’ai expérimenté dans ma vie†, confie-t-elle, malicieuse, fidèle àson image de rigolote pleine d’aplomb, que rien n’impressionne, pas même un (ex-)amoureux (Nicolas Bedos) qu’elle a fait rougir avec des souvenirs communs de turlute, pas même le public hystérisé par son défi de se mettre àpoil après la victoire de l’équipe de France de foot… Le niveau de cour de récré – zizis, seins nus, paris débiles… – lui sied parfaitement : elle aime en jouer, après en avoir joui. La carte du ciel n’est qu’un prétexte pour explorer le territoire des mots.

“Il y a les mots, mais surtout la façon de les dire, s’explique-t-elle. Des choses, dites d’une certaine façon, peuvent être vulgaires ; des choses agressives peuvent devenir drôles ; des choses peuvent sembler drôles et être en fait agressives ; c’est l’attitude qui fait tout.â€

 “Je me casse le cul àécrire des textes ; il fallait juste que je le montre, en faitâ€

L’attitude, oui, surtout, lorsqu’on se met ànu, courant dans un champ de pâquerettes disparues. Le buzz autour de sa chronique filmée dans le village de Poil l’a sidérée (un groupe Facebook de 150 000 personnes, la vidéo qui circule àplein, les articles dans la presse…). “Je me casse le cul àécrire des textes ; il fallait juste que je le montre, en fait†, constate-t-elle, lucide.

Quant au buzz après sa chronique face àNicolas Bedos, et la révélation en direct de leur liaison intime, il a dépassé ce qu’elle pouvait imaginer :

“Je ne voulais pas le ridiculiser, je l’adore profondément, je voulais juste jouer avec lui ; je n’ai rien révélé de très important, des photos de nous étaient parues dans les journaux ; on ne s’est même pas fâchés, on est allé boire un verre ensemble après l’émission ; il m’a juste dit : ‘putain, t’es gonflée !â€

Doria Tillier aime les surprises (du chef), les paris (fins), les cerises (sur le gâteau), les phrases qui tuent parce qu’on ne les attendait pas. Son plaisir consiste àsemer le trouble et le désarroi, ou insuffler de la joie sur un plateau rempli de personnalités accrochées àleurs discours promotionnels. “Les chroniques que je trouve réussies sont celles où je fais rire les gens sur quelque chose qui n’est a priori pas évident, construit àpartir d’un motif un peu décalé.†Si elle aime bien imiter des personnalités connues (Monica Belluci), elle excelle surtout dans l’invention de personnages inspirés de la vie réelle (la cagole qui fait des allusions sexuelles ; la coach en communication ; la Versaillaise coincée…). Pour tous ses rôles de décomposition, elle évite d’“être trop méchante†ou de “trop mettre les invités mal àl’aise†. Provocatrice mais gentille, infantile mais amicale. “Plus il y a d’interaction, plus c’est facile de faire sourire. Etre outrancier tout en restant classe, c’est très difficile†, reconnaît-elle.

“Je rêvais de faire ce jobâ€

 

La mécanique du rire la plus efficace n’est pas toujours indexée aux outils les plus élégants, elle le sait. C’est lorsqu’elle porta, par exemple, un collier en forme de pénis que les invités autour de la table s’étranglèrent de rire un soir, les larmes (de désespoir) aux yeux. La promesse de la miss météo, c’est, dit-elle, tout ce qu’elle aime : “le jeu, le fait que cela soit tous les jours différents, le format court†. “Quand je prenais des cours de théâtre, insiste-t-elle, je regardais tous les jours Louise Bourgoin, je rêvais de faire ce job.â€

>> A lire aussi : Doria Tillier face àBooba dans la météo du “Grand Journalâ€

 

Doria Tillier ne cesse d’explorer ses potentialités de douce flingueuse. “J’ai toujours aimé écrire des textes†, dit-elle ; aujourd’hui, elle les écrit avec son coauteur Bertrand Delaire. Au fil des émissions, elle a révélé sa grande nature comique, même si elle avoue qu’elle était déjà“assez drôle dans son enfance†. Au lycée Condorcet àParis, elle faisait “marrer (ses) potes†, avant d’aller errer dans les antichambres de la comédie (des voyages, des petits boulots, serveuse mais jamais mannequin…). Cliente de l’humour de Ricky Gervais, des frères Farelly, d’Eddie Murphy et de… Nicolas Bedos, elle songe, encore prudemment, monter sur scène un jour ou tourner dans des films.

Aujourd’hui, en contradiction avec les indices qu’elle livre chaque soir, elle affirme ne pas être très sà»re d’elle : “Je ne suis pas si drôle que cela dans la vie ; juste ce qu’il faut ; les copains qui m’entourent, eux, sont très drôles.†La tête un peu dans les nuages, elle affine son style jour après jour, apprend àtenir un plateau, àdire n’importe quoi avec panache, àdécrisper les gens raides, àébranler les plus fiers, àfaire oublier la pluie et le vent. Sa comédie vaut bien une carte floue du ciel.

 

 

Cet article est repris du site http://www.lesinrocks.com/2014/01/1...

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