Facebook réduit au silence les militantes du monde arabe

, par  Sophie Récamier , popularité : 1%

Pas facile d’être un activiste sur Facebook. Avec la multiplication des règles de comportement sur le réseau social, certains mouvements se voient bloqués dans leur élan. Dernières victimes en date, les cinq militantes de la page “le soulèvement des femmes dans le monde arabe”, qui appelle les femmes à poster des photos d’elles pour revendiquer plus de liberté. Alors que leur page atteint les 63 000 fans, elles ont toutes vu leurs profils bloqués mercredi matin.

Pour simple explication, un message : “Votre profil a été bloqué car vous avez posté du contenu qui viole les règles d’utilisation de Facebook”. Le compte de Yalda Younes, une Libanaise, est suspendu pour 30 jours. Ses amies écopent de suspensions allant de 24h à trois jours.

Une gaffe de Facebook

Tout est parti d’une photo, celle de Dana, une Syrienne de 21 ans, qui brandit à bout de bras son passeport. Sur le cliché, elle a la tête nue, mais sur le document elle est voilée. Dans ses mains, un mot : “Pendant vingt ans, je n’ai pas pu sentir le vent dans mes cheveux”.

La photo de Dana, de nouveau visible sur Facebook

Sitôt la photo publiée, elle devient le défouloir d’islamistes radicaux, qui postent insultes et menaces. Quelques jours après, le profil de Dana, ainsi que celui des administratrices est suspendu pour quelques jours. Rebelote mercredi dernier. Les femmes posent alors une question : Facebook chercherait-il à faire taire la voix de l’émancipation des femmes arabes ?

>> A lire aussi : L’automne des femmes arabes agite Facebook

L’explication est en fait bien plus terre à terre. Contacté par la rédaction, Facebook admet… une erreur. “Le profil des administratrices a ou va être rétabli très prochainement. Nous sommes très attachés à la liberté d’expression”, confirme la direction de Facebook France, sans donner plus de détails sur l’erreur en question. Concrètement, une centaine de personnes est affectée à la modération et surveille les contenus postés par les utilisateurs.

Et si on cherche un peu, dans les règles d’utilisation du réseau, il est indiqué qu’il est interdit “de poster les informations de quelqu’un d’autre”. Sur la photo du passeport, Dana apparaît voilée. Facebook aurait donc pu faire une simple gaffe en pensant que Dana brandissait le passeport d’une autre personne.

“On va continuer dans la vie réelle”

Une explication qui ne convainc pas Yalda Younes. “Ça parait absurde, il y a tellement de pages horribles, des pages extrémistes religieux, et c’est notre photo à nous qui pose problème !”

“Il y a déjà eu des précédents, rappelle Yves Gonzalez Quijano, enseignant à l’Université Lumière Lyon-2 et auteur d’Arabités numériques. En 2011, la page Palestininian Intifada a été supprimée à la demande du ministre de l’Information israélien au prétexte que des commentaires appelaient à la violence.”

Le chercheur estime que Facebook reste encore un formidable moyen pour les populations de pouvoir contourner la liberté ou la censure. “Sans même entrer dans la politique, Internet a un effet démultiplicateur très fort sur des sociétés qui étaient auparavant très fermées.”

Pour Yalda, cette mésaventure prouve une chose : “Il faut maintenant que notre combat continue dans la vie réelle. On a appelé nos fans à imprimer des pochoirs, elles l’ont déjà tagué dans les rues du Caire, de Riyad et de Manama”. Une Syrienne a également imprimé des tee-shirt à l’effigie du groupe Facebook, et en Palestine, un professeur s’est appuyé sur l’initiative des jeunes femmes pour animer un atelier avec ses élèves.

Cet article est repris du site http://www.lesinrocks.com/2012/11/0...

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