GIMP 2.8 est sorti : une fenêtre unique !

, par  antistress , popularité : 2%

La version 2.8 de GIMP, célèbre logiciel de traitement d’images, sortie le 3 mai 2012, concrétise trois ans et demi de développement.

Les principales nouveautés concernent tant l’interface (avec l’introduction des groupes de calques, la possibilité de présenter des boites de dialogue en colonnes, et surtout le fameux mode àfenêtre unique et onglets) que les outils (avec l’apparition d’un nouvel outil dit de transformation par cage sur lequel nous reviendrons dans le détail, et des améliorations apportées aux outils Brosses et Texte).

NdM : cet article est suivi d’un entretien avec Michael Muré, développeur de GIMP.

Sommaire

Cette dépêche a été rédigée collaborativement avec Nÿco, Florent, detail_pratique, Étienne BERSAC, Nils Ratusznik, Yves Bourguignon, Julien Jorge, Bruno, Xavier Claude, fero14041, Brndan et Benoît.

Un rythme de développement trop lent : constat et solutions

Depuis la précédente version stable (la 2.6, sortie le 1er octobre 2008), les versions de développement (7 en tout) se sont succédées àun train de sénateur jusqu’àil y a àpeu près un an, date àlaquelle les choses se sont accélérées :

  • Version 2.7.0 sortie en aoà»t 2009
  • Version 2.7.1 sortie en juillet 2010
  • Version 2.7.2 sortie en avril 2011
  • Version 2.7.3 sortie en aoà»t 2011
  • Version 2.7.4 sortie en décembre 2011
  • Version 2.7.5 sortie en mars 2012
  • Version 2.8.0-RC1 sortie en avril 2012

Le nombre de développeurs travaillant sur le projet est ridiculement réduit. Par ailleurs, tous les développeurs du projet étant bénévoles, il semble difficile d’arrêter des objectifs et des délais contraignants. Mais le mode de développement du projet est aussi en cause et Martin Nordholts (alias Enselic), un des principaux développeurs, propose des solutions pour l’avenir, comme de développer les nouvelles fonctions d’envergure dans des branches àpart destinées àêtre fusionnées au coup par coup avec la branche principale, plutôt que directement dans la branche principale de GIMP (actuellement si une fonction n’est pas terminée, elle bloque tout le processus).

Aperçu des nouveautés

L’interface àfenêtre unique

L’interface multi-fenêtres est très puissante et permet par exemple d’organiser son espace de travail au mieux dans le cas d’écrans multiples, ou simplement dans le cas d’écrans de petite taille comme ceux des netbooks. Elle peut cependant gêner les habitués de Photoshop ou autre.

Peter sikking a réfléchi àune interface àfenêtre unique dont le résultat figure (de manière optionnelle, via le menu Fenêtres) dans cette nouvelle version.

fenetre unique

Les petites vignettes du haut permettent de naviguer par onglets dans les images ouvertes.

Présentation des boites de dialogue en colonnes

Également optionnelle est la nouvelle possibilité d’afficher les boites de dialogue simultanément en colonnes plutôt qu’alternativement au moyen d’onglets. Cette fonction devrait particulièrement intéresser les utilisateurs dotés de plusieurs écrans dont un pourra afficher une fenêtre regroupant toutes les boites de dialogue tandis que les autres afficheront les images.

Les groupes de calques

Les calques peuvent dorénavant être regroupés et présentés selon une structure arborescente, pour faciliter la gestion de nombreux calques pour une même image.

calques

Pour créer un groupe de calques, sélectionnez l’entrée « Â Nouveau groupe de calques  » du menu Calques. Un nouveau groupe de calques apparaît dans la liste des calques ; il vous suffit alors de glisser-déposer des calques sur le groupe pour les ajouter àce groupe.

L’outil de transformation par cage

L’outil de transformation par cage, développé dans le cadre du GSoC 2010, fait son apparition dans cette nouvelle version (lire l’entretien mené avec son auteur en fin de dépêche).

L’utilisation d’un outil de transformation consiste àdécrire une région de l’image avec une forme de référence, puis àen déformer les bords de manière àce que le contenu de la région s’étire en suivant la déformation. Par exemple, l’outil de perspective représente l’image ou la sélection par un rectangle. L’utilisateur peut alors déplacer ses coins afin d’étirer son contenu en conséquence.

Jusqu’alors les outils de transformation dynamique proposés par GIMP se basaient sur une description de la zone àmodifier par un rectangle. La grande nouveauté de l’outil de transformation par cage est de permettre une description de la région àmodifier par un polygone libre. La transformation se fait ensuite en déplaçant les sommets de ce polygone pour ajuster l’image. Une vidéo de démonstration est disponible ici.

Nouvelle gestion de la dynamique des brosses

La dynamique des brosses (pression, vitesse, inclinaison…) est maintenant variable selon une liste de pré-réglages que l’utilisateur peut sélectionner dans un menu, mais qu’il peut également personnaliser par de nouveaux réglages en jouant sur 7 critères.

brosses

Nouveaux critères de réglages des brosses

Chacune des brosses peut être adaptée, en plus de sa taille, par son inclinaison et son ratio hauteur/largeur, par exemple pour ovaliser une brosse ronde.

Édition du texte sur le canevas

L’amélioration de l’outil texte a pour base un projet du GSoC 2008 qui a été ensuite perfectionné. Il est maintenant possible d’éditer le texte directement sur le canevas, c’est àdire sur l’image, en traçant un bloc texte àla souris ou en cliquant sur un texte existant. Les outils de mise en forme (taille, couleur, police…) apparaissent alors en surimpression sur l’image. De plus, il est désormais possible d’appliquer différents styles àdifférentes parties d’un même texte.

Enregistrements et formats d’exportation

Une distinction est maintenant plus clairement faite entre les enregistrements dans le format natif XCF et les exportations possibles dans les autres formats : en conséquence, la fonction Enregistrer enregistre en XCF exclusivement, et on passe par Exporter pour tout le reste.

Deux nouveaux formats graphiques exportables font leur apparition dans GIMP 2.8 : JPEG 2000 et OpenRaster. De plus, le format PDF a été ajouté àla liste des différents formats d’export, en mode mono-page ou même multi-pages en utilisant le menu Créer/PDF.

Divers

Beaucoup d’autres nouveautés sont présentes dans cette version. Citons-en quelques unes, sans prétendre àl’exhaustivité :

  • Introduction d’un nouveau jeu de brosses.
  • Possibilité d’affecter des mots-clés aux brosses, motifs, dégradés, palettes… pour en faciliter le tri.
  • Possibilité de créer des préréglages pour les options des outils afin d’éviter d’avoir àtoujours refaire manuellement les mêmes réglages.
  • Intégration transparente d’une calculette aux outils de redimensionnement (par exemple vous pouvez saisir dorénavant indifféremment une cote telle que 640+96, 640+15% ou 736).
  • Possibilité de verrouiller un calque pour empêcher toute modification accidentelle.
  • Possibilité de capturer une page web en indiquant simplement son adresse internet (au moyen d’un plug-in recourant au moteur d’affichage de pages Web WebKit).
  • La version 0.2.0 du moteur GEGL incluse gère l’accélération matérielle via OpenCL pour les puces graphiques qui le supportent, et àcondition de démarrer l’application avec le paramètre « Â GEGL_USE_OPENCL=yes  ».

Évolutions futures

GIMP 2.8 reste basé sur la version 2 de la boite àoutils GTK+, le portage vers la version 3 étant prévu pour une prochaine version (la prochaine ou la suivante). Pour ce qui concerne spécifiquement la toute prochaine version (2.10), celle-ci devrait enfin concrétiser le long travail de portage du cÅ“ur du logiciel sur le nouveau moteur (GEGL) ! Sans parler de l’intégration des outils développés dans le cadre du GSoC 2011 : Warp Transform tool (lire l’entretien ci-après), Seamless Clone. Il sera également intéressant de suivre l’avancée des projets retenus pour le GSoC 2012.

Entretien avec Michael Muré, « Â développeur de l’outil de transformation par cage et d’autres babioles  »

Bonjour, peux-tu te présenter en quelques mots ?

J’ai 25 ans, un DUT de génie électrique et informatique industrielle, et actuellement en stage en Corée du sud pour valider mon diplôme d’ingénieur en informatique.

Comment définirais-tu ton rapport au logiciel libre, et comment es-tu entré en contact avec lui ?

J’ai installé mon premier Linux il y a dix ans environ, et le deuxième environ trois heures après parce que je l’avais massacré. Ce qui m’a surtout intéressé au début, c’est de pouvoir regarder ce qui se passe effectivement sous le capot. J’ai lu énormément d’articles sur Linux, le logiciel libre, la technique en général (et en particulier sur LinuxFr ;) ). J’ai rapidement accroché àla philosophie du logiciel libre, autant d’un point de vue technique que d’un point de vue politique/sociétal. Je pense que la communication et l’art peuvent améliorer le monde et j’essaye d’y apporter ma pierre.

Tu as développé un nouvel outil présent dans cette nouvelle version de GIMP : l’outil de transformation par cage. Peux-tu expliquer en quoi il consiste ?

C’est un outil de déformation d’image qui utilise une cage (un polygone fermé avec un nombre arbitraire de poignées). L’outil est basé sur les coordonnées de Green (PDF). C’est une méthode mathématique qui exprime des points contenus dans la cage en fonction des positions des poignées et des arcs de la cage. Si on bouge la cage, on bouge le contenu. Ces coordonnées ont la particularité de préserver la forme du contenu. Par exemple, un angle de 90° restera toujours à90° après déformation, et on obtient une déformation bien plus naturelle qu’avec les autres méthodes, comme celle du meshdeform de Blender. Les illustrations du PDF sont assez explicites àce sujet.

Une des conséquences de cette préservation de la forme, c’est que le contenu de la cage va sortir de la cage, ce qui est apparemment un peu perturbant pour les premiers utilisateurs. Une petite démo est disponible sur YouTube.

Il s’agit du résultat d’un travail que tu as mené dans le cadre du Google Summer of Code 2010. Comment s’est déroulée cette expérience ?

C’était en même temps très intéressant et spécialement difficile, car j’ai dà» apprendre beaucoup de choses en peu de temps (GObject + GLib/GTK, Git, les autotools, comment ne pas se perdre dans ces milliers de lignes de code…). Adapter la méthode décrite dans le PDF au domaine de la déformation d’image a été un bon défi également car la transformation décrite est directe (avant —> après) alors qu’il faut une transformation inverse en traitement d’image, pour pouvoir échantillonner l’image source. Pour tout dire, j’ai plusieurs fois pensé abandonner, mais j’ai finalement réussi (NDLA : Lire ce billet sur le blogue de Michael expliquant le principe de la transformation inverse). En dehors de ça, travailler avec des développeurs extrêmement compétents est un vrai plaisir, et je ne regrette absolument pas l’expérience.

Quelles sont tes autres contributions àGIMP ?

J’ai participé une deuxième fois au Summer of Code pour GIMP, avec cette fois l’outil Warp, C’est une réécriture du plugin iWarp en un véritable outil, avec édition live directement sur le canvas, une transformation sans perte (on peut rétrécir une zone puis l’agrandir et retrouver l’original). Une petite démo est visible sur YouTube. Un peu d’indulgence, l’outil n’est pas terminé =)

En dehors de ça, j’ai surtout travaillé sur GEGL avec des améliorations mineures, nettoyage de code, internationalisation et correction de bugs.

Contribues-tu également àd’autres logiciels ? As-tu des projets en rapport avec le logiciel libre dans un futur proche ?

Si on oublie les projets pas trop sérieux, j’ai un projet de micro ERP pour Junior-Entreprise en PHP/Symfony (Ordo) que j’ai développé pendant mon cursus ingénieur. J’ai également dans les cartons un projet de réseau de partage de fichiers social et décentralisé qui essaye de répondre entre autres àce problème. Mais j’ai un peu de mal àtrouver du temps pour travailler dessus, l’avenir dira si il verra le jour ou pas.

Pour conclure, peux-tu nous en dire plus sur l’avenir de GIMP ?

GIMP n’a pas eu de grosse avancée visible ces dernières années mais ce n’est pas pour autant que le projet se meurt. Cette version 2.8 a été longtemps repoussée car la branche master n’était pas en état pour une nouvelle version (la faute au mode fenêtre unique non terminé principalement). Les méthodes vont changer pour éviter ça dans le futur. En même temps, on arrive vers la fin de très longs développements, en particulier de GEGL. Son intégration en profondeur dans GIMP a en fait déjàcommencé, puisque les mainteneurs de GIMP et de GEGL sont actuellement dans le même appartement, àhacker tout ce qui bouge. Après 15 jours (NDLA : l’entretien a été réalisé le 2 avril 2012), on arrive àdes statistiques plutôt impressionnantes :

$ git diff master… —shortstat
687 files changed, 25053 insertions(+), 32112 deletions(-)

L’intégration de GEGL apportera en particulier :

  • codage des couleurs en 32 bits flottants par canal par défaut et passage d’un espace de couleur àun autre de manière transparente grace àBabl, image àlarge dynamique de couleur (HDRI),
  • édition des images sans perte sous forme de graphe orienté d’opérations, avec la possibilité de remonter l’historique, de changer des paramètres et de recalculer l’image,
  • calcul sur carte graphique grâce àOpenCL.

GIMP n’est pas un clone de Photoshop, et essaye d’apporter sa propre vision. Pour plus de détails sur ce qui est prévu au niveau de l’interface, Peter Sikking, le responsable de utilisabilité a détaillé sa vision des choses. Pour l’éternel troll sur le CMYK, voir ici.

Merci pour l’entretien et ta contribution àGIMP.

Merci àceux qui l’utilisent :)

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Cet article est repris du site http://linuxfr.org/news/gimp-2-8-es...

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