Chers nouveaux mariés,

En cet heureux jour de votre mariage, toute la salle se joint à moi pour vous souhaiter une belle et longue vie à deux.

Nous sommes tous dans cette assemblée pétris d’admiration devant cette preuve de courage si formidable et à la limite de l’inconscience qui consiste à se promettre l’un à l’autre quand l’espérance de vie d’une Française tourne autour des 80 ans et celle d’un Français autour de 75. Vous en avez donc au bas mot pour trente années ensemble et pour bon nombre d’entre nous qui ne savons même pas ce que nous ferons la semaine prochaine, ça peut donner le tournis.

C’est fascinant de penser qu’en un coup de signature, deux personnes qu’on connaissait entières ne deviendront plus que la moitié l’une de l’autre.

Chère Soeur et Cher Beau-Frère, n’écoutez pas les statistiques déprimantes de sociologues cyniques et sans aucun doute malheureux en amour : si 50 % des couples divorcent, c’est pour mieux masquer les 50 % d’autres qui vieilliront ensemble.

N’écoutez pas les affreux conseillers immobiliers qui prétendent que la majorité de leurs ventes se fait grâce aux séparations matrimoniales, il y a aussi les décès dans le tas ; même si effectivement, la conjoncture démographique et les progrès de la médecine se prêtent plus à la rupture de PACS qu’à la rupture d’anévrisme.

Enfin et surtout, ne prêtez aucune attention aux auteurs de Lettres aux Cons dont l’unique tâche consiste à conjuguer la dérision et l’humour noir, alors que ce n’est pas du tout le lieu ni le moment car vous finirez bien par vous en rendre compte de vous-mêmes, heureux inconscients que vous êtes.

Voilà, ma soeur se marie aujourd’hui et si j’écris cette lettre remplie de sarcasmes, c’est peut-être avant tout parce que, chez nous, on n’a pas appris à formuler l’expression de toutes ces choses plus vraies et plus profondes qu’une grande soeur voudrait envoyer à sa cadette.

Cet article est repris du site http://www.lettresauxcons.com/2011/...